Olivier Cousin : »L’INAO est au service des vins rentables et polluants »
Le vigneron Olivier Cousin a commis une faute répréhensible aux yeux de la loi : il a mentionné un nom d’appellation – Anjou – sur l’étiquette de ses vins de table. Il risque aujourd’hui une amende de 37 500 € ou même la prison. Un vaste mouvement de soutien, international, s’est créé puis développé via Internet… Buzz dans un verre de vin ou véritable scandale icebergué ? Entretien.
Vindicateur – ''Anjou Olivier Cousin - AOC'' imprimé sur des cartons de tes Vins de Table, c'est cela que la Répression des Fraudes te reproche ? Et tu encours vraiment 2 ans de prison et 30 000 € d'amende ?
Olivier Cousin : L'inscription ''Anjou Olivier Cousin'' sur les cartons n'est pas l'objet du procès-verbal, cela fait plutôt sourire le contrôleur... La fraude vient du fait d’inscrire sur la contre-étiquette ANJOU PUR BRETON, de mettre sur l’étiquette ''l’éthique du domaine'' et ''mise en bouteille à la propriété'', et d’indiquer parfois le millésime, parfois le cépage : autant de mentions trompeuses sur le produit, puisque c'est un vin de table… Le mot ANJOU étant réservé aux vins d’appellations, il y a en effet tromperie répréhensible de 37 500 € ou 2 ans de prison maximum (la peine de mort étant abolie depuis 30 ans). Le procureur de Maine et Loire décidera de mon sort.
Vindicateur – Quels sont tes éventuels recours ?
Olivier Cousin : Mon recours sera le tribunal. Désormais nous sommes nombreux à nous plaindre de ces mesquineries administratives et du lobby des syndicats et des interprofessions. Il est temps de dévoiler le monde du vin tel qu’il est... Il vous faisait rêver ce monde ? Eh bien il vous trompe. On ne vous dit pas tout sur les publicités et les étiquettes. Le vin n'est pas toujours fait qu'avec du raisin… Je défends le droit d'étiqueter un vin artisanal naturel, comme un produit alimentaire de base, avec toutes les indications possibles.
Vindicateur – Une pétition de soutien lancée par Sylvie Augereau a déjà reçu plus de 700 signatures, et notamment celle de nombreux acteurs du vin (vignerons, cavistes, journalistes, blogueurs...). Qu'en espères-tu ?
Olivier Cousin : La pétition que Sylvie fait signer est très intéressante. Nous sommes nombreux à nous comprendre, et j'apprends plein de choses en lisant les commentaires sur ''Glougueule''.
Vindicateur – Comment t'expliques-tu cette solidarité, qui touche même des journalistes/blogueurs étrangers, anglais ou américains par exemple ?
Olivier Cousin : Je vends le peu de vin que je fais dans le monde entier, et j'explique d’ailleurs cette solidarité par le fait que nous travaillons dans le vrai et le vivant en faisant notre vin.
Vindicateur – Pourquoi tes vins ne sont-ils pas ou plus en AOC Anjou ? Est-ce que c'est de ton fait, un choix assumé, délibéré ; ou les conséquences d'un rejet systématique à l'agrément ?
Olivier Cousin : J'ai quitté volontairement l'AOC parce que le mode de production ne me convenait plus : trop de facilité, trop d'intrants autorisés, pas de notion d'écologie. Enfin, rien de brillant pour l'avenir. J'ai choisi la culture Biodynamique et le vin de table Angevin.
Vindicateur – Est-ce que tu as provoqué sciemment cette situation ? Est-ce que tu la recherchais, et si oui, pourquoi ?
Olivier Cousin : Oui, j'ai provoqué sciemment cette situation, j'ai défendu le vin d'Anjou et j'aime l'Anjou, et je ne peux plus supporter la tyrannie de l'interprofession.
Vindicateur – C'est quoi le problème de ton AOC, des AOC en général, selon toi ?
Olivier Cousin : J'ai produit pendant 25 ans du vin en appellation d'origine contrôlé, sans aucun contrôle, et maintenant que je fais du vin sans contrôle, je suis contrôlé ! Maintenant je fais du vin de table, toujours sur le même vignoble en Anjou, mais je ne fais plus de vin d'Anjou ? Aujourd’hui, la chose importante pour moi c’est de dénoncer la mainmise des syndicats viticoles et des interprofessions sur le vin ; qui barrent la route aux vins naturels, biologiques ou biodynamiques... L'INAO est au service des vins rentables et polluants.
Propos recueillis par Antonin Iommi-Amunategui
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©Vindicateur, 10/2011