Michel Rolland fait son Mondovino

Publié le : 13 octobre 20174 mins de lecture

Le meilleur livre sur le vin est une BD*. Et le pire ? Peut-être celui qu’a écrit (à quatre mains) l’œnologue Michel Rolland. Une espèce de pamphlet autobiographique, un long ronronnement d’égo et de banalités, bien enroulé autour de 25 pages de vengeance perso à l’endroit de Jonathan Nossiter.  »Le gourou du vin » ? Un livre plutôt inutile, franchement ennuyeux, qui donnerait presque envie de revoir le film  »Mondovino » (qu’on avait pourtant complètement oublié !).

Toi aussi, lis l’agenda de Michel Rolland

La life de Michel Rolland c’est trop bien. Ses rendez-vous, ses rencontres, ses clients, ses amis, ses notes, ses commentaires, ses voyages. Glénat, l’éditeur, a carrément inventé un genre : le livre-agenda ! Mais qui est-ce que ça peut bien intéresser ? Aucune idée.

OK, soyons honnêtes, il y a 2-3 anecdotes qui auraient pu valoir le détour. Peut-être sa rencontre avec le critique américain Robert Parker en 1982, millésime charnière à Bordeaux ? L’anniversaire où ils s’enquillent 27 bouteilles de leur date de naissance commune, le fameux millésime 1947 ? La  »taupe » qui serait à l’origine de la BD  »Les sept péchés capiteux » ? Problème, aucun des deux auteurs ne parvient à rendre ces passages savoureux ou édifiants. C’est plat comme le plateau de Pomerol.

 

Chacun son boulot, coco

Le style (sic) de Michel Rolland est souvent épais ou affecté. Ecrire, il paraît que c’est un métier. On imagine que la journaliste Isabelle Bunisset, cosignataire de l’ouvrage, a fait ce qu’elle a pu pour sauver le bouquin ; mais ça n’aura pas suffi.

Entre autres pichenettes, Michel Rolland moque les dégustateurs du dimanche et les journalistes qui se piquent de faire du vin. Chacun son métier, résume-t-il. Et on a bien envie de lui rendre la pareille, à lire ces 200 pages laborieuses, soporifiques la plupart du temps, et sans grand intérêt en général.

 

Nossiter dans le viseur

Mais ce bouquin, Michel Rolland a manifestement décidé de l’écrire parce que sa colère à l’égard de Jonathan Nossiter n’en finissait pas de lui remonter dans la gorge. Tout le livre est à l’évidence un prétexte, bâti autour de ce chapitre. Ma vie, mon œuvre… Pour en arriver à ces 25 pages où Jonathan Nossiter en prend pour son grade.

Oh, le réalisateur de Mondovino n’est sûrement pas irréprochable, et son film évidemment partisan. Bien sûr. Mais ce règlement de comptes, 10 ans après, n’a aucune sorte d’intérêt. Il est d’ailleurs aussi laborieux que le restant du livre. Soit, en somme, 175 pages de confiture à peu près insipide, étalée autour d’un noyau vengeur.

 

Boire ou lire ?

En ne lisant pas  »Le gourou du vin », on s’épargnera donc des amoncellements de phrases toutes faites ; des propos souvent aussi caricaturaux que ceux que Michel Rolland dénonce si fort chez ses ennemis de longue date : Jonathan Nossiter, mais aussi Périco Légasse et Jacques Dupont.

Non, vraiment, à 20€ le bouquin, on fera mieux de s’acheter, tiens, une bouteille de Pomerol ? Évidemment pas Le Bon Pasteur (le vin de Michel Rolland), pas moyen à ce prix-là. Mais le Cadet de Gombaude, par exemple. Second vin du Château Gombaude-Guillot, le Cadet 2010 sera mis en bouteilles fin avril, et il serait – attention, spoiler – assez proche du premier vin.

 

* : référence à l’excellente bande-dessinée d’Etienne Davodeau,  »Les Ignorants » (Futuropolis, 25€ environ), mettant en scène la rencontre entre un vigneron et un dessinateur, célébrée ici-même le 4 mars dernier, avant de recevoir le prix  »Gourmand Awards » du meilleur livre de vin de l’année deux jours plus tard. A noter, dans un autre registre, celui de la presse alternative, la sortie dans les kiosques de L’Impossible n°2,  »l’autre journal ».

 

Antonin Iommi-Amunategui

©Vindicateur, 04/2012

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