Tout le Bio résumé en une page ?

Publié le : 14 août 20205 mins de lecture

Agriculture biologique ou Biodynamie, vin  »naturel » ou vin  »nature » ? On a vite fait de s’emmêler les pipettes. Qui aurait l’audace de se lancer dans une tentative de vulgarisation-éclair ? Tout le bio résumé en une page… Impossible et casse-gueule.

C’est quoi ce fichu L entre  »nature » et  »naturel » ?

 

Pour commencer par la fin, un vin dit  »nature » est un vin qui n’a de sulfites que ceux présents naturellement ; on dit qu’il est  »sans soufre ajouté ». Ces trois petits mots ont d’ailleurs déclenché une série de micro-tempêtes dans le milieu du vin : vins qui  »puent », vins  »déviants »,  »vinaigre », vins  »d’intégristes », vins de  »bobos »,  »connerie » – ou vins  »authentiques »,  »cerise sur le gâteau » ; des vins qui seraient réussis seulement par les vinificateurs expérimentés ?

 

Débat souvent superflu, bizarre, politisé… Ces vins  »nature », réputés plus fragiles, doivent être conservés à 14° maximum. C’est ce qui ressort d’une petite enquête que nous avons menée auprès de différents vignerons. Côté dégustation, ils peuvent être remarquables, intenses et faciles à la fois. Mais, au-delà de leur éventuelles qualités gustatives, certains cavistes et restaurateurs les craignent et n’en commandent jamais, car la probabilité qu’ils aient souffert du transport – et soient irrémédiablement abimés – est d’après eux plus grande.

 

A noter que les vins dits  »naturels » peuvent, selon l’Association des Vins Naturels, revendiquer de faibles dosages de sulfites ; et c’est principalement ce qui les différencie des vins  »nature ». Mais,  »nature » ou  »naturels », ces vins sont – en général – issus de l’agriculture biologique, et connaissent – normalement – le moins d’interventions possibles au cours de leur vinification. Deux étapes, viticulture et vinification, à distinguer l’une de l’autre, car le  »bio » répond encore aujourd’hui à une législation très large, pour ne pas dire approximative, qui ne réglemente à peu près rien au-delà des vendanges ; on pourra donc trouver des choses très différentes sous le fameux label AB.

 

 

La Biodynamie est ton amie ?

 

Il existe, par ailleurs, des modes de culture biologique alternatifs, comme la Biodynamie qui consiste, en deux mots, à tenir compte d’un calendrier précis et à utiliser des traitements biologiques spécifiques. On lira à ce sujet l’entretien que nous a accordé Olivier Humbrecht, en première ligne sur le front de la Biodynamie, ou encore celui de Jean-Paul Daumen, en Biodynamie depuis 2000 sur son Domaine de la Vieille Julienne. La Cosmoculture, technique et marque déposée (pour  »éviter toute récupération ») par le Domaine Viret, est une autre de ces voies, qu’on découvrira également mieux à travers cet entretien de Philippe Viret.

 

 

Oh, la belle bio !

 

Bien entendu, bio ou pas, tous les vins issus d’une culture attentive ( »raisonnée » pour reprendre l’expression consacrée) et d’une vinification soignée, peuvent être tout à fait bons. Il n’en semble pas moins vrai que, de plus en plus souvent, les meilleurs vins – c’est-à-dire ceux réputés tels par la plupart des commentateurs – sont issus de l’une ou l’autre des cultures de type biologique brièvement décrites plus haut. Pas de chapelle ici, seulement un constat, mathématique.

 

Mais s’agit-il d’un effet de mode, d’une suggestion de masse, ou d’une réalité fondée ? On peut d’ailleurs se demander, presque naïvement, si le Domaine de la Romanée-Conti cherche à être à la mode lorsqu’il se convertit entièrement à la Biodynamie en 2007 ? Ou encore si Pauline Vauthier (Château Ausone) cherche à surfer sur la vague lorsqu’elle affirme que la plupart des premiers grands crus classés de Bordeaux s’orientent vers le bio ?

 

Pour conclure, chacun trouvera ses plaisirs et déplaisirs où il veut, mais il paraît légitime de demander à ce que les commentateurs cessent de décrier telle ou telle pratique au-delà de toute mesure. Qu’on foute donc la paix aux vignerons, en particulier à ceux qui ont des convictions avant d’avoir du pognon. Qu’on les laisse commettre des erreurs, chercher leur voie, tâtonner, tenter et, parfois, réussir des choses impeccables… avec ou sans soufre ajouté.

 

A-t-on, d’ailleurs, rempli le contrat et réussi à  »résumer tout le bio en une page » ? C’est loin d’être sûr… Mais le Petit Guide Loisel du Vin l’a fait avant nous et plutôt pas mal du tout !

 

 

Antonin Iommi-Amunategui

©Vindicateur, 09/2010

À lire en complément : A quoi sert un blog ? (Blogging, what’s the point ?)

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