C’est pas Jude Law à boire

Publié le : 14 août 20205 mins de lecture

Le festival de Kannes, cette année, est déchaîné… Sur Vindicateur, c’est pas Jude Law à boire, mais presque : des Pomerol démaquillés, élégants mais pas lisses. De la classe, zéro esbroufe. Quelques ridules et du peps. Château Gombaude-Guillot 2003 et 2001, en rafale lente. Et Olivier Techer, le garçon  »à tout faire » de Gombaude-Guillot, en héritier starisé !

Olivier Techer prend cher

 

Pour rester dans le ton, pailleté dehors, plus déjanté en coulisses, on pose d’abord quelques questions décalées à Olivier Techer, le fils dans la famille aux manettes à Gombaude-Guillot. Olivier a 30 ans ; 2 ans qu’il turbine officiellement sur le domaine, aux côtés de Claire Laval (sa mère, propriétaire et gérante) et de Dominique Techer (son père, directeur technique). La propriété est d’ailleurs dans la famille depuis 1868. En voisins directs, ils ont Trotanoy ou encore L’Eglise Clinet… Pour percer sur la croisette du plateau de Pomerol, il faut jouer des coudes !

 

Gombaude-Guillot, vin de star ?

OT : Un vin de star, je ne pense pas. Nous n’avons jamais versé dans l’ostentatoire. Gombaude-Guillot, c’est la pureté du fruit et l’équilibre, pas les paillettes. Un vin d’amateur, de connaisseur plutôt. Même si, bien entendu, on peut être à la fois star et connaisseur !

 

Gombaude Guillot, à Cannes ?

 

OT : Je suis allé une fois à Cannes, pour présenter nos vins, et ce qui m’a frappé c’est ce magnifique littoral bétonné. Quel gâchis ! De plus le service dans l’hôtel était très limite pour un cinq étoiles… Et ne parlons pas des chauffeurs de taxi, désagréables au possible. Sinon j’aime le cinéma, mais le Festival, ça me fait ni chaud ni froid. Bien sûr, si Scarlett Johansson nous y invite, je ferai mon possible pour me libérer. Et oui, entre les mains de Scarlett, une bouteille de GG serait du plus bel effet.

 

Gombaude Guillot, si c’était un film ?

 

OT : Mondovino 2 le Retour, dans le camp des gentils, bien entendu ! Sérieusement, j’ai adoré Mondovino, et je ne trouve pas qu’il soit si manichéen que ça…

 

Gombaude Guillot, un millésime du siècle ?

 

OT : Pour le 20ème siècle, j’aime beaucoup 1975, n’en déplaise à M. Robert Parker Jr. Concernant le 21ème, je dirais 2009, pour sa grande finesse et son élégance. Petits veinards, ça tombe bien, nous en avons encore !

 

Gombaude Guillot, Pomerol rebelle ?

 

OT : Oui, clairement. Ma mère a  »découvert », en 1992, qu’elle était dans le cahier des charges AB… A l’époque mes parents passaient pour des originaux, pour rester poli. Même de nos jours, il n’y a que 3 crus sur 150 certifiés AB à Pomerol : Gombaude-Guillot, Clos Plince (que nous produisons) et La Croix Taillefer, de Romain Rivière (quelques autres domaines sont en conversion, Bellegrave, La Rose Figeac…). En outre, nous ne vendons pas nos vins en primeur et nous occupons nous-mêmes de leur commercialisation, sans passer par le négoce bordelais. Nous refusons clairement ce système qui nous semble aller à l’encontre de nos propres intérêts : la réputation des vins de Bordeaux s’étant faite sur des vins de longue garde, et non sur des vins high-tech à la durée de vie très limitée…

 

 

Dégustation de deux millésimes de Gombaude-Guillot, par Vindicateur.

 

 

Gombaude-Guillot 2003 : un Pomerol qui n’amasse pas mousse

 

GG 2003, pour les intimes. On démarre au quart de tour, avec un nez de vent chaud – framboise kérosène – mûr et finement exotique. La bouche, qui suivra de près, délivre une richesse fractale, disloquée en petits éclats solaires, sans excès. C’est cohérent avec le millésime brûlant, mais encore bien croquant. Un Pomerol qui n’amasse pas mousse, généreux !

 

 

Gombaude-Guillot 2001 : c’est pas Jude Law à boire ?

 

Sur le 2001, on a des rôles de composition à la pelle : avec de la fraicheur, des herbes en bataille, des champignons marinés au chocolat, des châtaignes emmitouflées de ganache, des cerises à peine cuites… On se repasse cette jolie carrière en boucle, sûrement typique d’une belle évolution. Mais la matière n’en est pas moins précise, encore svelte, bien expressive. Avec de l’allonge… En définitive, c’est bien Jude Law à boire : élégant mais pas lisse.

 

 

Retrouvez la totalité des vins du Château Gombaude-Guillot sélectionnés sur Vindicateur.

 

 

Antonin Iommi-Amunategui

Photo montage : JB, Vindicateur

©Vindicateur, 05/2011

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