Le vin de demain, quoi qu’il advienne nous appartient

Publié le : 13 octobre 20174 mins de lecture

Une ode au jeunisme, à la sauce vin ? Ça se tente. Le vin, issu de traditions séculaires, millénaires, est de plus en plus souvent entre les mains de jeunes hommes en dreadlocks, de rockers reconvertis, quand ce ne sont pas des domaines emblématiques comme la Romanée-Conti qui voient leur nom détourné par des groupes de rock délirants… Le vin est-il (enfin) la proie de la jeunesse hirsute ?

Les Romanée Counteez

 

Ce groupe qui revendique des influences méchamment variées (Elvis Presley ou les Ramones), et que l’excellent webzine BourgogneLive a déjà joliment mis en lumière, est originaire de Dijon. Ses membres se font appeler Freddy Mercurey, Claude Vougeot, Fernand Vergelesses ou encore Jaco Passetougrain… On est en Bourgogne, pas de doute. Mais l’humour dont ils se masquent n’empêche pas la qualité de leur musique :  »Une distillation franche des meilleurs cépages soniques… » (Les Inrockuptibles) ;  »rien de clinquant, uniquement du vivant, habité, dérangé, rock, tout simplement rock. » (Cafzic). Et si le ton était donné, par ce drôle de biais : il faut désacraliser le vin, quitte à se foutre gentiment de sa gueule.

 

 

Du sang neuf dans le vin

 

Etats-Unis cette fois, pour un rappel : ou quand le leader de plusieurs formations de rock/metal (Tool, A Perfect Circle…) se reconvertit en vigneron et entend faire de grands vins en plein Arizona. Et ils en font même un film de cinéma : Blood into Wine (qu’on ne verra sûrement jamais sur grand écran de ce côté-ci de l’Atlantique, vu comme ils bataillent déjà pour décrocher une poignée de salles aux Etats-Unis, mais sur petit écran pourquoi pas ?). Certes, le leader en question, Maynard James Keenan, n’est plus tout à fait un jeune au sens comptable du terme à 46 ans, mais un rocker reste un rocker : il a l’état d’esprit.

 

 

Le péril du vin jaune ?

 

Néo-vigneron-ne-s largement sensibilisé(e)s aux questions environnementales, jeunes hommes hirsutes, ou pendouillant de dreadlocks comme on en croise sur Le Blog d’Olif (et qui font semble-t-il de très bons vins). La jeunesse, une certaine jeunesse, se penche donc sur les vignes, y trouve quelque chose à dire, voire à redire. Des jeunes gens qui s’approprient le vin, ses codes, ses techniques, mais les tordent à l’envi et font finalement peu de cas des modèles trop établis : ils font d’abord du vin à leur image.

 

Est-ce à dire qu’une lame de fond juvénile est en passe de trancher la gorge d’un certain classicisme dans le paysage viticole ? Bien sûr que non. Surtout qu’on a vu déjà des fils moins jeunes que leur père (le vieil Hubert de Montille a l’air d’un gamin à côté de son fils, bien plus sérieusement coincé, dans le film Mondovino). Le futur directeur de Léoville-Las-Cases aura 28 ou 29 ans à sa prise de fonction ; mais combien dedans sa tête ? Pas davantage, espérons-le.

 

Alors plus qu’un âge, c’est un certain état d’esprit qui peut forcer le respect : enthousiasme, engagement, sincérité ; des valeurs sans âge, mais qu’il faut sûrement appeler et rechercher parmi les jeunes générations… Pour une rébellion des bienfaisants ? (Les jeunes gens ont des raccourcis faciles.)

 

 

Antonin Iommi-Amunategui

© Vindicateur, 05/2010

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